• Trois cotes

     

    Voici un texte dont la première version remonte à tout juste un an. Je l'ai retravaillé au début du mois de septembre dernier. J'y explique comment j'ai tiré au sort trois cotes dans le rayon DVD de ma bibliothèque, puis comment, à partir de ces cotes, j'ai choisi trois films à emporter chez moi.

    Le texte ne dit pas lequel de ces trois films j'ai préféré !  :)

     

     

    Trois cotes

     

    Il est l’heure de fermer la bibliothèque passée de quelques minutes et je suis, comme d’habitude, un des derniers à sortir, avec tout le respect et les égards que je dois à ma nature nonchalante.

    J’entends un dernier groupe de collègues qui se préparent à quitter les lieux et je les assure que cela ne me dérange pas de fermer l’établissement même si ce n’est pas à mon tour de le faire.

    Fabrice, de la discothèque - le dernier à partir - vient de remonter du sous-sol où je suis resté seul maintenant et où se trouve le rayon DVD devant lequel je m’agenouille, une poignée de documents à la main. Je ne suis pas en train de ranger ces documents mais occupé à choisir des films dont j’ai décidé de tirer au sort la cote.

    Pour ce faire, j’ai préparé un jeu de 78 cartes où figurent, chacune en trois exemplaires, les 26 lettres de l’alphabet. Le jeu est rangé dans une boîte en plastique : j’ouvre la boîte, en extrais les cartes qui, forcément, ayant été imprimées sur du papier brouillon, ne glissent pas comme j’aimerais. Je passe sur cet inconvénient et obtiens les trois tirages suivants : VLO, TYC, IEC. Trois tirages qui vont me servir en de balises jusque vers les cotes alphabétiques les plus proches.

    Je commence par le dernier tirage obtenu, IEC.

    A la cote, IDI, je trouve deux films dont je n’ai jamais entendu parler, que je n’aurais jamais eu seul l’idée d’emprunter. Il va pourtant falloir en choisir un.

     Je vais choisir L’idiot, un film de Pierre Léon, d’après le roman de Dostoïevski. Ce n’est pas le romancier russe qui me décide, ni Pierre Léon, qui est un illustre inconnu pour moi, mais cette affiche en noir et blanc que je tiens à présent entre les mains, où l’actrice Jeanne Balibar se tient debout de profil, enveloppée d’un châle et, assis à côté d’elle, un jeune acteur que je ne connais pas et qui la regarde fasciné exactement comme moi je pourrais la regarder si j’étais à sa place.

    Je continue avec le deuxième tirage, TYC.

    Je découvre qu’il me faut choisir entre quelques films réunis  sous la cote TWO : mon attention  se fixe à nouveau sur une affiche en noir et blanc. Deux hommes torses nus, crânes rasés, tenant chacun dans leurs mains un long bout de bois taillé, scrutant le sol à la recherche de quelque chose qui m’échappe. Le film s’appelle Two gates of sleep. Il est réalisé par Alistair Banks Griffin, dont je n’ai jamais entendu parler. Je réalise soudain la totale inutilité des informations inscrites au dos de la jaquette. L’affiche m’intrigue : cette raison me paraît, à elle seule, suffisante.

    Il me reste un choix à faire, à partir du premier tirage, VLO.

    Sous la cote VIV sont réunis plusieurs films, dont Vivement Dimanche, que je me persuade avoir vu alors que je confonds avec La femme d’à côté. J’hésite entre Vivre sans peur, de Kurosawa et Vivre libre, de Jean Renoir. Deux films que j’aurais pu voir adolescent  à la télévision en cachette de mes parents endormis un vendredi ou un dimanche soir, très tard, après 23 heures, lorsqu'il n'y avait encore que trois chaînes publiques et que je rêvais un jour de faire du cinéma.

    Kurosawa m’intimide encore un peu, reste Renoir… et Charles Laughton dans le rôle principal, celui d’un instituteur dans une petite ville en France sous l’occupation. Renoir, le réalisateur de La grande illusion et Laughton, celui de La nuit du chasseur. Il me semble que cela fait très longtemps que je n’ai plus vu de films comme celui-ci. J’emprunte Vivre Libre et retourne à mon bureau chargé de trois nouveaux documents dont le choix a d'abord été guidé par le hasard, puis par la simple curiosité, ou bien une émotion plus profonde.

    Il est passé 18 heures 15. La bibliothèque ferme maintenant définitivement ses portes.

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